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Réplique à l’abbé Grosjean de René Poujol

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Réplique à l’abbé Grosjean de René Poujol

Dans une interview à la Vie, l’abbé Pierre-Hervé Grosjean nous explique, en toute charité chrétienne et communion ecclésiale, que la jeune génération catholique est en train de tirer un trait définitif sur les chrétiens honteux que nous avons été.

(…) Je viens de lire, sur le site de la Vie, l’interview accordée à mon confrère Henrik Lindell par le Père Pierre-Hervé Grosjean qu’il n’est plus besoin de présenter aux familiers de la cathosphère. Et cela à propos de la tenue à Rambouillet, d’une session de formation à l’engagement politique de 200 jeunes chrétiens de 20 à 25 ans. D’autres initiatives similaires existent, notamment à l’initiative du Ceras des pères Jésuites ou des Semaines sociales de France. Et pour ma part, je ne puis que m’en féliciter.

De jeunes catholiques… entre tradis et charismatiques

En revanche, ce sont les commentaires du père Grosjean qui, pour le coup, appellent… à réagir. Que ces jeunes, tels qu’il les dépeint et l’explique, se recrutent majoritairement parmi les mouvements scouts (on imagine qu’il s’agit ici des Scouts d’Europe…) et plus précisément dans le milieu étudiant ayant pris une part active aux Manifs pour tous et aux rassemblements ultérieurs des Veilleurs n’est pas une réelle surprise et ne représente pas un problème en soi. Pas même le fait qu’il les situe ecclésialement comme se baladant quelque part «entre tradis et charismatiques».

Non, une fois de plus, car le père Grosjean est sur ce point multirécidiviste, l’insupportable, est cette prétention à nous présenter cette «jeunesse-là» comme la seule cohérente avec sa foi, ce type d’engagement comme le seul compatible avec l’enseignement des papes et les exigences de l’Evangile ; ce qui l’autorise, au passage, une fois de plus, à ringardiser les générations «aînées». Admirez l’élégance d’analyse : «Le vrai clivage n’est pas entre tradis et charismatiques mais entre ceux qui prennent le tournant du christianisme identifié et décomplexé et ceux qui restent dans l’Eglise des années 80 où il faut s’excuser d’être chrétien.»

Je suis, et d’autres avec moi, de cette Eglise des années 80 et, n’en déplaise au père Grosjean qui parle ici de ce qu’il n’a pas vécu, je ne me suis jamais excusé d’être chrétien. Si j’ai fait le choix d’une carrière dans la presse catholique c’est parce que j’y voyais un moyen d’être cohérent avec ma foi. Et je ne pense pas que Jean Boissonnat, Noël Copin, Jacques Duquesne pour évoquer quelques confrères journalistes ou, aujourd’hui François Soulage et Guy Aurenche dans le secteur de l’action caritative, aient jamais été des catholiques honteux.

Un catholique conséquent descend dans la rue défendre la famille

Mais lorsque l’abbé Grosjean poursuit : «Les catholiques pratiquants qui pensent que leur engagement est basé sur leur foi sont ceux qui sont descendus dans la rue l’an dernier.», le loup sort du bois. Que ceux des chrétiens qui se battent sur les fronts du chômage, du mal-logement, de l’exclusion, de l’immigration, de la pauvreté, de la solidarité avec le Tiers monde et interpellent en ce sens la classe politique ou s’engagent eux-mêmes en politique aillent se rhabiller. Ce ne sont que des chrétiens «complexés», adeptes de «l’enfouissement» qui, semble-t-il, n’est plus au goût du jour (1). Les «décomplexés», eux, les seuls vrais se recrutent exclusivement parmi les «défenseurs» de la famille et de l’éthique. Voilà les chantres du non-négociable repartis dans leur croisade d’épuration ethnique et leur revendication d’un droit d’exclusive sur l’agir chrétien.

Que le cardinal Barbarin pour lequel le père Grosjean semble avoir une affection toute particulière soit «descendu dans la rue» à plusieurs reprises avec ces «bons jeunes» et fasse partie des intervenants à ce séminaire, c’est son droit le plus strict. Mais je persiste à contester que l’on ne soit «chrétien conséquent» qu’à la condition de descendre dans la rue pour défendre les valeurs familiales. Il est d’autres combats qui justifieraient notre mobilisation, comme il est d’autres manières de se positionner «en chrétien» dans ces débats de société.

Nous voici rangés… à la périphérie

Le plus insupportable enfin est cette insistance à nous expliquer que «le discours de ces jeunes est celui du pape» comme s’ils étaient les seuls à recevoir l’enseignement du pape François. et parce que tout feu d’artifice comporte un bouquet final : «La grande majorité des évêques français se sont engagés sur la même ligne. Cela ne veut pas dire qu’il faut ignorer ceux qui sont dans la périphérie. C’est le rôle des prêtres de faire la communion». Nous voilà rangés parmi les périphériques à évangéliser. Et vu l’engagement unilatéral de l’abbé Grosjean, je m’interroge sur sa réelle capacité à être ce qu’il prétend : homme de communion.

René POUJOL

Ancien Rédacteur en Chef du Pèlerin

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