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Le pape François interviewé par des enfants des bidonvilles de Buenos Aires

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Le pape François interviewé par des enfants des bidonvilles de Buenos Aires

Le Pape a répondu aux questions des jeunes d’un quartier pauvre de Buenos Aires. Quitte à s’aventurer sur le terrain des campagnes électorales.

Que se passe-t-il quand le Pape accepte d’être interviewé par les jeunes d’un bidonville ? Eh bien, pour une fois, les questions ne tournent pas autour de la communion aux divorcés remariés, de la réforme de la Curie, de la place des femmes dans l’Église ou encore du mariage des prêtres ou des finances du Vatican... Non, les jeunes des périphéries sont plus intéressés par des sujets existentiels, comme la drogue, la foi, les relations virtuelles ou la personne du Pape. Et même, pourquoi pas, la politique.

D’où l’interview qui vient de paraître, non pas à la une du grand quotidien argentin La Nacion, mais dans la Càrcova News, le journal de rue d’un quartier pauvre de Buenos Aires, surgi il y a cinquante ans autour d’une gare. Le quartier est confié au soin pastoral d’un chouchou – ou plutôt d’un fils spirituel – de l’ancien archevêque de Buenos Aires, le père Pepe di Paola (ceci expliquant cela). C’est lui qui a recueilli et mis en forme les très nombreuses questions des quelque 600 jeunes qui ont préparé cette interview et qui les a posées au Pape, lors d’un passage à Rome, le 7 février dernier. Il y flotte le parfum de proximité des catéchèses du mercredi, sur fond de déjà entendu (exemple : « Ayez toujours une bible sur vous ») et d’inédits (« Renier Dieu est le pire des péchés »), ces derniers faisant la richesse de cet entretien, en partie traduit par Aleteia.


L’expansion de la drogue et le triomphalisme des trafiquants

Concernant la drogue, très présente dans les bidonvilles, l’ancien archevêque de Buenos Aires souligne qu’« il y a des pays qui sont esclaves de la drogue et cela est inquiétant. Mais, précise-t-il, ce qui m’inquiète le plus, c’est le triomphalisme des trafiquants. Ces gens chantent déjà victoire, ils ont gagné, ils triomphent. Cela est une réalité ». Le Pape ajoute qu’« il y a des pays ou des régions où tout est sous domination de la drogue ». En ce qui concerne l’Argentine, « avec respect », il ose dire : « Il y a 25 ans, c’était un lieu de passage de la drogue, aujourd’hui, on en consomme. Et, je n’en ai pas la certitude, mais je crois qu’on en fabrique aussi ».


Le plus important à donner aux enfants, c’est la foi

À la question : « Quelle est la chose la plus importante que nous devons donner à nos enfants ? », le Pape répond : « Le plus important, c’est la foi. Cela me fait beaucoup de peine quand je rencontre des enfants qui ne savent pas faire le signe de croix. Ces enfants n’ont pas reçu la chose la plus importante qu’un père et une mère puisse donner : la foi ». Le Pape a également insisté sur l’importance de l’échange et de l’écoute, ainsi que sur celle du jeu : « Si vous ne jouez pas avec vos enfants, vous les privez de la dimension de la gratuité ».


Dieu n’abandonne pas ses enfants

Le Pape a poursuivi en expliquant le pourquoi de son optimisme et de sa foi en l’homme : « Toute personne peut changer, même les plus éprouvées. Je connais des personnes qui étaient tombées très bas et qui aujourd’hui sont mariées et ont une famille ». Comment est-ce possible ? Grâce à deux certitudes, répond le Pape. La première, c’est que « l’homme est image de Dieu et que Dieu ne méprise pas son image. [Au contraire,] Il la rachète toujours, d’une façon ou d’une autre ». La deuxième, c’est « la force de l’Esprit Saint, qui peut changer la conscience ». Et donc, affirme le Saint-Père, « ce n’est pas de l’optimisme, c’est de la foi en la personne, parce qu’elle est enfant de Dieu. Dieu n’abandonne pas ses enfants. Nous, ses enfants, (…) nous nous trompons, nous péchons, mais quand nous demandons pardon, Dieu nous pardonne toujours. Il ne se lasse pas de pardonner. C’est nous, quand nous nous croyons importants, qui nous fatiguons de demander pardon ».

La foi n’est pas un sentiment, ni une attitude psychologique : c’est un cadeau

Revenant sur la foi, le Pape a ajouté : « Il y a des hauts et des bas. Parfois, nous sommes conscients de la présence de Dieu, parfois, nous l’oublions. (…) La foi n’est pas un sentiment. Parfois, le Seigneur nous fait la grâce de la ressentir, mais la foi est quelque chose de plus. La foi, c’est ma relation avec Jésus-Christ, qui, je le crois, m’a sauvé ». Sur ce chemin, a-t-il insisté (une nouvelle fois), on marche « toujours avec l’Évangile dans la main. Ayez toujours un Évangile dans votre sac. Ayez-le aussi à la maison. C’est la Parole de Dieu. C’est ainsi qu’on alimente la foi. Finalement, la foi est un cadeau, ce n’est pas une attitude psychologique. Et si on nous fait un cadeau, on le reçoit, non ? Eh bien, recevons le cadeau de l’Évangile et lisons-le. Lisons et écoutons la Parole de Dieu ».


Dieu me fait faire des choses qui se voient

Les jeunes osent alors cette question : votre vie a été intense, riche. Nous aussi, nous voudrions vivre une vie pleine, intense. Comment fait-on pour ne pas vivre inutilement ? « Je n’ai pas toujours eu une vie si riche et intense, répond le Pape. Je suis un pécheur, comme tout le monde. (…) Le Seigneur me fait faire des choses qui se voient, mais il y a tant de personnes qui font de bonnes choses qui ne se voient pas ! L’intensité n’est pas directement proportionnelle à ce que les gens voient. L’intensité se voit à l’intérieur. »


Renier Dieu, qui nous aime, c’est un des pires péchés qui soient

Comment l’alimente-t-on ? Par la foi, « et en faisant des œuvres de fécondité, des œuvres d’amour pour le bien des gens. Le plus grand péché contre l’amour est de renier une personne. Renier une personne qui nous aime en faisant comme si on ne le connaissait pas. La renier, alors qu’elle nous aime. Celui qui nous aime le plus, c’est Dieu. Renier Dieu, c’est un des pires péchés qui soient. Saint Pierre a commis ce péché, il a renié Jésus-Christ. Et il est devenu Pape ! ».


L’importance de l’écoute et du dialogue avec celui qui ne pense pas comme nous

Répondant à une question, le Pape admet que dans son entourage, il y a des personnes qui ne sont pas d’accord avec ce qu’il dit et fait. Mais il ajoute qu’« écouter les personnes » ne lui a « jamais fait de mal ». « Chaque fois que je les ai écoutées, cela m’a réussi. Et les fois où je ne l’ai pas fait, cela s’est mal passé. Parce que, même si on n’est pas d’accord, cela nous apporte toujours – toujours ! – quelque chose ou nous pousse à repenser à nos positions. Et cela nous enrichit. Si je ne suis pas d’accord avec quelqu’un, que je me garde de le saluer, que je lui ferme la porte au nez, refuse de lui parler et ne lui demande rien, c’est évident que je me disqualifie. Le dialogue est riche. En dialoguant et en écoutant, on s’enrichit. »


Le jeune-musée et la fécondité dans la vie

À propos des relations virtuelles et de la surinformation, le Pape remarque que le danger que les jeunes courent aujourd’hui est de se transformer en « musée ». « Un jeune-musée est très bien informé. Mais que fait-il de tout ce qu’il détient ? La manière d’être fécond, dans la vie, ne passe pas par l’accumulation d’information ou le seul maintient de communications virtuelles mais par le changement, concrètement, de l’existence. Ce qui, au final, signifie aimer. »


L’harmonie entre les « trois langages »

« L’amour virtuel n’existe pas. La déclaration d’amour virtuel existe, mais le vrai amour inclut le contact, physique, concret. (…) J’aime parler des trois langages : celui de la tête, celui du cœur, et celui des mains. Il doit y avoir une harmonie entre les trois. De telle façon que l'on pense ce que l’on sent et ce que l’on fait, que l’on sente ce que l’on pense et ce que l'on fait, et que l'on fasse ce que l’on sent et ce que l’on pense. Ça, c’est du concret. S’en tenir au plan virtuel, c’est comme vivre avec une tête sans corps ».

Pour des campagnes électorales sinon gratuites, au moins limpides

À un an des élections, quel conseil donne François aux hommes politiques argentins ? D’abord, avoir « un programme électoral clair. Que chacun dise explicitement : si je suis élu, je ferai "cela", parce que je pense que c’est "cela" qu’il faut faire. Le programme électoral est [quelque chose de] très sain, cela aide les gens à voir ce que pense chacun. (…) Il faudrait également faire en sorte que les campagnes électorales soient gratuites, parce que sinon, ensuite, ceux qui ont financé adressent leur facture… Bien sûr, c’est un idéal, parce qu’il faut toujours de l’argent pour les affiches, pour la télévision. Mais au moins, que le financement soit public. Que l’on sache qui a financé qui et à quelle hauteur. Que tout soit transparent, limpide ».


En Argentine en 2016 ?

Enfin, le Pape a-t-il peur d’être tué par un fanatique ? Sa réponse est franche : « Ma vie est entre les mains de Dieu. J’ai dit au Seigneur : "Garde-moi. Mais si c’est ta volonté que je meure ou qu’on me fasse quelque chose, je Te demande seulement une faveur : celle de ne pas souffrir. Parce que je ne suis pas très courageux devant la douleur" ». François a également dit qu’il se rendra dans son pays en principe en 2016, mais que cela reste à confirmer.

ELISABETH DE BAUDOÜIN

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